#19 Blocages actuels : ce que conseille la Cour des comptes
et comment cela peut tous nous aider !
Bonjour à toutes et à tous,
Lundi 16 juin 2025, et voici ma dix-neuvième Réplique.
Nous sommes désormais plus de 1030 Répliqueurs. Merci pour cela !
Un petit cœur en haut ou en bas m’aide à bien référencer ce contenu (et me fait très plaisir, vous vous en doutez).
Cette semaine, nous retournons à notre analyse du système actuel avec le dernier rapport de la Cour des Comptes qui met en avant les blocages du système actuel. Dans les 3 axes pour avancer et s’en sortir, pour la première fois, il est question du numérique !
Vous l’avez compris, j’ai chaussé mes lunettes et j’ai été éplucher le rapport.

Le dernier rapport de la Cour des comptes est consacré à l’enseignement primaire. Son titre : « Une organisation en décalage avec les besoins de l’élève » ! Il confirme une difficulté bien connue : notre école peine à concrétiser les ambitions que la République lui assigne.
Ce rapport mérite toutefois qu’on s’y arrête en raison de l’institution qui en est à l’origine. La Cour des comptes, organe indépendant de l’ordre administratif français, est chargée de contrôler les dépenses de l’État. En partenariat avec les chambres régionales des comptes, elle tente de répondre à une question simple : les moyens engagés en faveur de l’enseignement primaire portent-ils leurs fruits ? Rappelons que l’éducation représente l’un des premiers postes budgétaires de l’État, à hauteur de 89 milliards d’euros en 2025.
Dans un contexte où s’affrontent les discours réclamant plus de moyens et ceux qui appellent à des coupes budgétaires, ce regard nous renseigne sur ce qu’il en est vraiment.
Parmi les recommandations formulées, l’une retient particulièrement mon attention : celle d’un usage plus réfléchi du numérique au service des apprentissages. Non pas comme un gadget ou un affichage technologique, mais comme un levier pédagogique à part entière pour construire l’école de demain. Alléluia.
Au programme de la dix-neuvième Réplique :
Un constat que nous connaissons déjà trop bien
“L’impérieuse nécessité de repenser le modèle actuel”: le numérique mis en avant
Pour un numérique au service de l’école républicaine
Le mot de la fin
1. Un constat que nous connaissons déjà trop bien
Un système éducatif « en situation d’échec », une « organisation en décalage avec les besoins de l’enfant », des « inégalités qui s’aggravent » : les constats du rapport sont sévères, mais loin d’être inédits.
Malgré une augmentation constante de la dépense publique dédiée à l’école primaire au cours des dix dernières années, les résultats des élèves français demeurent préoccupants. En mathématiques, les élèves de CM1 se classent en bas du tableau des pays européens (ayant participé aux enquêtes). En français, la tendance est similaire. Et ce, alors même que les élèves français passent, en moyenne, plus d’heures à l’apprentissage des fondamentaux que leurs camarades européens.
Le rapport insiste sur le lien persistant entre origine sociale et réussite scolaire. L’école primaire, pourtant censée poser les fondations de l’égalité républicaine, ne parvient ni à élever le niveau global, ni à réduire les écarts.
Autrement dit : rien que nous ne sachions déjà — mais que nous n’avons toujours pas réussi à transformer.
2. “L’impérieuse nécessité de repenser le modèle actuel”: le numérique mis en avant
Le rapport constate un bilan mitigé de l’effort de dédoublement des classes en primaire. Au-delà de cette mesure, la Cour des comptes invite à ouvrir plusieurs chantiers : l’attractivité du métier d’enseignant, la révision de l’organisation du temps scolaire, et la clarification de la gouvernance des écoles — notamment via un renforcement du rôle des directrices et directeurs d’école afin de leur permettre de porter des projets d’établissement davantage adaptés aux réalités locales.
La question du temps scolaire est, elle aussi, posée. La Cour rappelle que la semaine de quatre jours à l’école primaire reste une exception au sein de l’OCDE. Dans la majorité des pays, les élèves bénéficient d’une semaine répartie sur cinq jours, permettant de raccourcir les journées de classe et de mieux respecter la chronobiologie des enfants.
Mais le rapport souligne aussi une opportunité : la baisse démographique à venir. Moins d’élèves, c’est potentiellement plus de souplesse pour repenser l’organisation de l’école autour du bien-être des enfants. Et parmi les leviers identifiés, l’un revient avec insistance : tirer pleinement parti du numérique dans les pratiques pédagogiques. Le numérique est ainsi présenté comme un levier central pour l’école de demain !
Le rapport de la Cour des comptes souligne une carence structurelle dans la stratégie nationale du numérique à l’école primaire et notamment la difficulté à articuler les initiatives locales, les investissements en matériel, et les objectifs pédagogiques. Cette absence de pilotage stratégique se traduit par des décisions fragmentées, souvent portées par les collectivités locales sans accompagnement pédagogique ni soutien durable.
Sans pilotage stratégique le numérique ne peut pas être un levier d’égalité au service de la réussite scolaire. Ce que ce rapport souligne avec force, c’est qu’en l’absence d’une gouvernance forte et d’un projet partagé, le numérique ne transformera pas l’école. Il restera marginal, sous-exploité — ou pire, ignoré.
Pour remédier à ces insuffisances, il faudrait une intégration réfléchie du numérique dans la pédagogie.
« Renforcer la formation initiale et continue des enseignants », afin que le numérique ne soit plus perçu comme un simple accessoire, mais comme un véritable levier d’apprentissage.
Une « progressivité de l’usage du numérique éducatif », en veillant à respecter le développement cognitif, émotionnel et physique des enfants.
En somme : mieux former les équipes éducatives, renforcer l’accessibilité des outils et favoriser les usages. Le numérique ne doit pas être un simple affichage technologique, mais un moyen au service d’un projet pédagogique d’avenir maîtrisé.
3. Pour un numérique au service de l’école républicaine
Pour que le numérique ait un sens à l’école, il faut qu’il serve un vrai projet républicain et qu’il renforce ce que l’école publique doit garantir à tous : l’égalité des chances, l’émancipation par le savoir, et la formation de futurs citoyens républicains. À ces conditions, il peut devenir un outil utile, juste et profondément transformateur.
Dans une école républicaine, l’égalité des chances exige un accès réel au numérique pour tous, à l’école comme à la maison. Mais cet accès n’a de sens que s’il s’accompagne de la formation des enseignants et d’un accompagnement permettant aux élèves de développer des usages critiques et autonomes.
Le numérique peut aussi favoriser l’émancipation par le savoir en adaptant les apprentissages aux besoins de chacun. Il permet de personnaliser les approches, de renforcer la confiance des élèves, et de soutenir ceux qui risquent de décrocher.
Enfin, il est un outil central pour former des citoyens éclairés, capables de s’informer, de débattre et de se protéger dans l’espace numérique. Apprendre à l’utiliser, c’est aussi apprendre à vivre ensemble dans une démocratie.
Il faut donc un véritable projet du numérique à l’école : un enjeu d’avenir — comme le dit le rapport — pour l’école de demain, et déjà pour celle d’aujourd’hui.
Finalement, le numérique oblige à reconsidérer les finalités mêmes de l’éducation : doit-elle préparer à l’emploi, à la citoyenneté, à la liberté de penser, à tout cela à la fois ? Ces interrogations nécessitent un débat collectif, démocratique, associant enseignants, élèves, parents, chercheurs et citoyens (comme nous l’avons vu le mois dernier !) Car au-delà des outils, c’est bien la place que l’on accorde à l’école dans notre projet de société qui est en jeu. Cette clarté nous permettra de sortir des discours inaudibles sur “les écrans” et de réfléchir posément aux besoins de nos élèves.
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